Boostée par le progrès technologique et l’évolution de la demande des consommateurs, la popularité grandissante des protéines alternatives de ces dernières années impacte déjà le monde de la gastronomie. Comment les chefs voient-ils cette évolution ? Adoptent-ils les protéines alternatives et contribuent-ils à en augmenter la croissance et la popularité ? L’Enquête auprès de Chefs sur les nouveaux aliments réalisée par GEA fait le point sur la croissance des protéines alternatives, vue à travers les yeux de chefs cuisiniers du monde entier.
Réalisée en août 2022 par GEA, l’Enquête auprès de Chefs sur les nouveaux aliments apporte de nombreux éléments intéressants sur la façon dont les professionnels de la restauration gèrent la transformation alimentaire en cours. Elle lève le voile sur leur expérience des nouveaux aliments, sur l’état actuel de la demande de la clientèle des restaurants et sur ce que les chefs prévoient pour l’avenir proche. Ses conclusions permettent de mieux comprendre la transition vers les nouveaux aliments.
Considérant que les chefs gagnent leur vie avec la nourriture et vont même, dans de nombreux cas, jusqu’à se définir par leur respect des traditions alimentaires et culinaires, nous pouvions imaginer qu’ils accueilleraient les protéines alternatives avec une saine dose de scepticisme. Certes, notre Enquête auprès de Chefs sur les nouveaux aliments a constaté qu’il existait quelques sceptiques chez les chefs : quelques-uns d’entre eux ont snobé la question, d’autres n’avaient jamais entendu parler des protéines alternatives et d’autres encore ont semblé peu intéressés à approfondir le sujet. Mais il faut dire que ceux qui ont réagi ainsi étaient nettement en minorité. En fait, la grande majorité des chefs interrogés connaissaient bien les divers types de protéines alternatives et les utilisaient déjà en cuisine.
Si nous prenons les aliments solides et les boissons à base de plantes par exemple, seuls 2 % des chefs n’en avaient « jamais entendu parler ». 6 % en avaient entendu parler mais ne savaient pas grand-chose sur le sujet. Les 92 % restants en revanche connaissaient bien les aliments et les boissons à base de plantes, et une majorité d’entre eux (63 %) ont même indiqué être bien informés sur le sujet. C’est d’ailleurs loin d’être très surprenant. Les produits à base de végétaux comme les boissons au soja et les burgers végétariens existent depuis des dizaines d’années, le tofu et le tempeh depuis des millénaires.
Ainsi, même si nous nous penchons sur les protéines cultivées à base de cellules de synthèse (les plus innovants de tous les types de protéines alternatives), les chefs sont 80 % à dire bien les connaître. Plus précisément, 41 % d’entre eux affirment très bien connaître les aliments cultivés à base de cellules de synthèse. C’est remarquable car nous en sommes encore aux balbutiements de la viande cultivée, qui est encore loin d’être produite et disponible à grande échelle. Les données de l’étude suggèrent que de nombreux chefs cuisiniers sont parfaitement conscients que la viande cultivée et les produits similaires pourraient redéfinir la façon dont les gens mangeront à l’avenir, et qu’ils comprennent qu’il convient de s’y intéresser de près et de ne pas passer à côté de cette tendance fondamentale.
La plupart des chefs ne se contentent pas de prendre conscience de cette nouvelle tendance dans le domaine de l’alimentation, ils contribuent aussi à son développement. Près de 90 % des chefs utilisent déjà dans une certaine mesure des produits alternatifs à la viande et aux produits laitiers dans leur travail, plus d’un tiers disent même les utiliser dans une large mesure. L’utilisation de produits de remplacement des poissons, des fruits de mer et des œufs est un peu moins répandue, mais là encore 30 % des chefs les emploient dans une large mesure. S’il y a un message à retenir de cette enquête, c’est que la plupart des chefs cuisiniers du monde ne se contentent pas d’être de simples spectateurs : pour eux la transition vers les nouveaux aliments a commencé.
Il est clair que le haut niveau de sensibilisation et d’utilisation des protéines alternatives observé chez de nombreux chefs s’explique en partie de par leur intérêt professionnel : ils veulent être bien informés sur les développements alimentaires et surfer sur cette tendance en croissance. Mais comme l’enquête l’indique clairement, leur intérêt naît aussi de la demande grandissante de la clientèle. Leurs clients et, de manière générale, la clientèle des restaurants demandent toujours plus de produits qui remplacent les aliments traditionnels. Près de 90 % des chefs ont remarqué une hausse de la demande de produits de remplacement de la viande et des produits laitiers traditionnels, 40 % d’entre eux signalent même une forte hausse de cette demande. Concernant les alternatives aux poissons, aux fruits de mer et aux œufs, les chiffres sont légèrement plus bas, mais ils indiquent toujours une hausse significative de la demande.
Tout cela concorde avec les retours récents des consommateurs. Une enquête réalisée en 2022 par Blue Horizon/Boston Consulting Group auprès de 3700 consommateurs dans le monde a établi que plus de la moitié d’entre eux étaient des consommateurs occasionnels de protéines alternatives, 35 % des consommateurs fréquents et 13 % des consommateurs « exclusifs ou quasi-exclusifs » de ces protéines. Une enquête européenne du Good Food Institute réalisée en 2022 a conclu que la moitié des consommateurs d’Espagne et d’Italie mangeaient déjà de la viande à base de plantes tous les mois, et que 65 % des Espagnols, 55 % des Italiens, 57 % des Allemands et un tiers des consommateurs français disent vouloir acheter de la viande cultivée quand elle sera disponible sur le marché. Enfin, une autre étude récente a montré qu’au Royaume-Uni et aux USA 80 % des consommateurs sont ouverts à l’idée de manger de la viande cultivée.
Quand on leur demande quels sont les principaux moteurs de la demande croissante de protéines alternatives chez les clients de leurs établissements, la plupart des chefs cuisiniers citent la santé et les questions environnementales. 79 % des répondants pensent que leurs clients sont motivés par des préoccupations d’ordre environnemental, tandis que 74 % citent les raisons de santé parmi les facteurs de motivation. Les chefs sont moins nombreux (50 %) à voir les questions éthiques, telles que le bien-être animal, comme une motivation.
Trois chefs interrogés sur quatre (75 %) considèrent que l’alimentation est de manière générale un facteur qui influence la santé humaine de manière considérable, et à peine moins des deux tiers (62 %) considèrent qu’elle influence de manière très importante la santé de l’environnement. S’ajoute à cela que près de la moitié des chefs (48 %) croient que les nouveaux aliments de substitution peuvent avoir un impact conséquent sur l’amélioration de la santé humaine ou environnementale. Comment les chefs envisagent-ils leur rôle dans ce contexte ? Les résultats de l’enquête indiquent que de nombreux chefs et restaurants sont conscients de la responsabilité personnelle et professionnelle qu’implique pour eux le fait de se poser en leaders. Pour commencer, un tiers (33 %) affirment réduire de manière significative la quantité de viande qu’ils consomment pour des raisons liées à la santé et à l’environnement. Près de 15 % sont complètement végétariens ou végans. Presque tous (96 %) communiquent que leur restaurant adopte des mesures pour diminuer son impact environnemental, 44 % affirment même travailler activement (« dans une large mesure ») sur ce front. Et la majorité des chefs (53 %) ont le sentiment de jouer eux-mêmes un rôle crucial dans les choix alimentaires de leurs clients, plus d’ailleurs que les médias sociaux, la publicité, les amis, la famille, les influenceurs ou les critiques gastronomiques.
L’Enquête auprès de Chefs sur les nouveaux aliments réalisée par GEA révèle que les chefs qui ont des préférences alimentaires personnelles (par ex., sont végétariens, piscivégétariens ou végans) sont bien mieux informés et plus positifs à l’égard des protéines alternatives. D’autres caractéristiques sont également associées à un plus grand intérêt, engagement et optimisme concernant le New Food. Par exemple : Les chefs basés en Asie connaissent en général mieux les protéines alternatives et sont plus optimistes quant à la capacité du progrès technologique à booster la consommation. Ils ont aussi davantage l’impression que les clients de leurs restaurants demanderont plus de protéines alternatives à l’avenir. Les cheffes considèrent elles connaître particulièrement bien le New Food. Elles sont plus intimement convaincues que leurs homologues masculins que les nouveaux aliments ont déjà atteint un niveau de qualité qui n’a rien à envier aux aliments traditionnels. Les jeunes chefs, enfin, ont davantage expérimenté les nouveaux aliments et ont davantage conscience que c’est à eux de développer la tendance New Food parmi la clientèle de leurs restaurants.
Les chefs cuisiniers du monde entier sont nettement convaincus que la tendance des protéines alternatives poursuivra son essor dans les années à venir. Près de 95 % ont l’impression que les clients de leurs établissements seront plus demandeurs de protéines à base de plantes au cours de la prochaine décennie, la moitié d’entre eux tablent même sur une forte hausse de la demande durant cette période. Les chiffres sont similaires pour les protéines cultivées à base de cellules de synthèse, pour lesquelles 45 % des chefs prévoient une forte croissance de la demande. Même en ce qui concerne les protéines et les aliments à base d’insectes, 36 % des chefs pensent que leurs clients demanderont considérablement plus de ces denrées au cours des dix prochaines années, un résultat dû essentiellement aux chefs basés en Asie.
Près d’un quart des chefs cuisiniers interrogés (23 %) s’attendent à ce que les nouveaux aliments constituent plus de 50 % de l’ensemble des aliments en 2040. 43 % des répondants pensent quant à eux qu’entre un quart et la moitié de tout ce que nous mangerons sera composé de nouveaux aliments et ingrédients alimentaires à l’horizon 2040. Pris ensemble, ces chiffres dressent un tableau clair pour les décennies à venir. Ils suggèrent que nombreux des chefs interrogés, dont la plupart ont moins de 40 ans, pensent que les protéines alternatives joueront un rôle important qui ira augmentant pour leur profession.
De manière générale, l’Enquête auprès de Chefs de GEA montre clairement que les professionnels de la restauration sont en grande partie ouverts et positifs concernant les protéines alternatives. Si certains peuvent certes avoir des doutes, les données de l’enquête indiquent très clairement que seuls 10 % des chefs environ peuvent être classés dans la catégorie des « sceptiques ». Les 90 % restants se divisent de manière pratiquement égale entre ceux que nous pourrions qualifier d’ambassadeurs, c’est-à-dire ceux qui sont clairement positifs concernant l’avènement des protéines alternatives, ont déjà utilisé des nouveaux aliments et sont confiants quant à leur potentiel futur, et les « adeptes prudents », qui voient les nouveaux aliments en général positivement mais sont plus réservés quant à leur utilisation et au moment de faire des prévisions. Les « adeptes prudents » ont tendance à penser que nombreux des nouveaux produits alimentaires actuels n’ont pas encore atteint une qualité à la hauteur de la restauration. Cette attitude n’est pas surprenante, ne serait-ce que parce que les trois quarts des répondants travaillent dans des restaurants aux prix élevés. Cela correspond par ailleurs largement aux résultats d’une étude récente auprès des consommateurs, qui a établi clairement que les consommateurs en général, même s’ils sont largement ouverts et voient positivement les protéines alternatives et leurs avantages, souhaitent que la qualité continue à augmenter. La majorité des chefs cuisiniers (70 %), en effet, voit une meilleure qualité comme essentielle pour accroître la consommation des nouveaux aliments à l’avenir.
Mais il faut toutefois remarquer que près d’un tiers des chefs ont aujourd’hui l’impression que les protéines alternatives ont déjà atteint un niveau de qualité suffisant sur le plan du goût, de la texture et du prix, pour remplacer dans une large mesure les aliments produits traditionnellement. C’est un chiffre considérable, qui témoigne d’ailleurs des formidables progrès réalisés au niveau de la qualité des protéines alternatives ces dernières années. Le niveau d’intérêt général des chefs concernant l’utilisation des protéines alternatives confirme ce que des chiffres toujours plus nombreux nous disent : les nouveaux aliments ne sont pas une simple possibilité, mais une nouvelle réalité qui prend pied.
• Plus de 1000 chefs cuisiniers interrogés
• 11 pays couverts
• 60 % des répondants sont installés dans des métropoles
• Les ¾ des chefs interrogés travaillent dans des établissements aux prix moyens/chers
En 2022, GEA a travaillé en partenariat avec le cabinet d’études de marché Lindberg International pour son Enquête auprès de Chefs sur le New Food. L’équipe en charge de l’étude a rédigé un questionnaire sur la base de quatre entretiens téléphoniques avec autant de chefs cuisiniers, installés au Danemark, en Allemagne, en Espagne et au Royaume-Uni. Après avoir créé le questionnaire et l’avoir traduit dans les différentes langues, Lindberg International a effectué 1002 interviews en ligne (en août 2022) avec des chefs cuisiniers de 11 pays différents : le Brésil, la Chine, le Danemark, l’Allemagne, l’Inde, Israël, les Pays-Bas, Singapour, la Corée du Sud, le Royaume-Uni et les États-Unis.
Image de l’en-tête : UPSIDE Foods
Heinz Kroner dirige l’unité fonctionnelle New Food de GEA, qui se consacre principalement à la production de protéines alternatives. Il s’exprime sur la position de GEA en tant que fournisseur mondial de technologies de procédé, et sur le rôle-clé joué par GEA pour soutenir cette industrie naissante.
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